29-03-2024 11:23 AM Jerusalem Timing

Nettoyage ethnique à Adra: un rescapée raconte

Nettoyage ethnique à Adra: un rescapée raconte

"Les gens ont laissé leurs proches blessés ou morts gisant dans les rues".

M. D., une femme syrienne, secrétaire du lycée d’Adra à l’Est de Damas, vit dans cette cité ouvrière depuis plus de 23 ans. Mère de trois filles, cette veuve raconte au site d’information arabi-press ce qui s’est passé entre autre à Adra après l’infiltration des milices armées :

« Mercredi dernier, les tirs des milices s’approchaient de plus en plus de nous. Alors que j’accompagnais mes enfants à l’école, nous croisions la route de l’assistante pédagogique qui m’a demandé de rentrer vite chez nous parce que les miliciens ont pris d’assaut la ville.

« Immédiatement, j’ai rebroussé chemin et tous les habitants ont commencé à se diriger vers le centre-ville. En moins d’un quart d’heure, nous avons entendu des tirs de feu nourris en bas de l’immeuble. Un milicien criait avec un accent saoudien : « Que tous les civils descendent au sous-sol ! ».

« Nous sommes accourues, mes filles et moi, à l’intérieur du bâtiment, où un homme portant une robe courte, une veste en cuir, et un pantalon tâché de boue et avait une longue barbe, parlait avec un accent saoudien, et tirait dans l’air après chaque mot. Dans le sous-sol, utilisé d’habitude comme dépôt, s'étaient abritées trois autres familles, l’une sunnite de Damas, l’autre de Nawa (circonscription de Deraa), également sunnite et une famille chrétienne de Sadad.

« Dix minutes plus tard, un milicien saoudien est venu et a commencé à crier : Que les chrétiens et les alaouites viennent ici. Je lui ai répondu qu’il n’y avait pas de chrétiens ni d’alaouites dans notre immeuble. En effet, nous avons caché ces familles parmi nous. L’homme a commencé à vérifier nos cartes d’identité et à tirer en l’air avant de partir.

« Nous avons entendu ensuite des tirs de toutes parts. Dans la main droite, l’homme portait un fusil mitrailleur et dans l’autre main il tenait une épée. Il faisait un froid glacial dans le sous-sol, où nous étions privés de nourriture, d’eau et d’électricité.
« Cinq jours avant de quitter le sous-sol, un milicien armé est venu chercher dans le sous-sol. Il a trouvé la famille chrétienne. Il l’a emmenée vers une destination inconnue, et pour l’instant nous n’avons rien de ses nouvelles.

 Et pendant que nous sortions du sous-sol, le 30/12/2013, j’ai vu les corps dans les rues, la moitié était dévorée par les chiens affamés. Notre voisine courait dans la rue et criait follement : « Ils ont coupé leurs têtes, ils ont coupé leurs têtes.
« Cette voisine est alaouite. Les miliciens ont décapité les têtes de ses trois fils et ont enlevé ses filles et son enfant de trois ans. Je demandais des nouvelles de certains voisins alaouites.

Un décret religieux promulgué par des religieux wahhabites a autorisé les miliciens de prendre les femmes alaouites comme esclaves: en fonction de cette décision elles sont violées.   

« Les habitants m’ont dit que les hommes armés ont décapité les alaouites et enlevé les chrétiens pour les échanger. Ils ont tué une famille entière originaire de Salmiya que je connaissais . A notre sortie, un cheikh saoudien a commencé à nous dire : "ne vous rendez-pas à l’Etat des tyrans mécréants. Ici se trouve l’Etat de l’Islam".

« Ils ont ouvert le feu en notre direction. Une femme a été tuée à côté de moi. Nous avons commencé à courir. La scène était pénible. Les gens ont laissé leurs proches blessés ou morts dans les rues. Une fois arrivés à la seule issue de la ville, l’armée syrienne nous attendait là-bas. Elle a cherché des bus pour nous transporter ailleurs. La tragédie est affligeante : il y a plus de 500 personnes et des milliers de disparus», conclut la femme originaire de la cité ouvrière d’Adra.

source: arabi-press

Traduit par notre site